Malaise dans la civilisation

Il est frappant de constater que les tentatives de sortir avec des solutions hétérodoxes du piège de l’endettement qui se referme sont rejetées par certains sans qu’ils ne daignent énoncer d’alternative. L’émission de dette perpétuelle est particulièrement ciblée, sans doute parce qu’elle n’imposerait pas de remises en question majeures et que la formule a déjà été employée au sortir de la seconde guerre mondiale.

François Villeroy de Galhau, le gouverneur de la Banque de France, entend « dénouer le mythe de la monnaie magique ». Dans le cas de la dette perpétuelle, la prime de risque réclamée par les investisseurs serait élevée, prétend-il, à un niveau « beaucoup plus coûteux que la dette actuelle ». Mais il se garde bien d’évoquer le niveau que cette prime atteindra lorsque le moment sera inévitablement venu de « rouler » la dette lorsqu’elle arrivera à maturité. Un sacré pari sur l’avenir !

Jean Pisany-Ferry a choisi un autre angle d’attaque : « annuler la dette, c’est toujours en transférer le fardeau à d’autres » assène-t-il sans aller plus loin. Sans livrer le fond de sa pensée, il attaque les partisans de « l’économie vaudou » et leur « mystification » : les mots sont forts pour masquer la faiblesse du raisonnement.

Il faut se méfier quand les raisonnements font trop appel au bon sens ! de même qu’il est hautement préférable de saisir avec des pincettes les prévisions économiques précises – par définition appelées à être revues – quand l’incertitude domine. Les épidémiologistes sont plus conséquents quand ils reconnaissent que leurs modèles mathématiques sont soumis à rude épreuve dans le cours de la pandémie actuelle. La fiabilité des données et le grand nombre des paramètres, ainsi que la nouveauté déroutante de ce qui est observé, rendent leurs prévisions très ardues, alors que les biologistes reconnaissent être encore loin d’avoir percé tous les mystères du virus. Comme toujours, la science économique bénéficie d’un statut à part et ses épigones font preuve d’une grande assurance. C’est par construction !

Est-elle de mise, à lire les minutes de la dernière réunion des gouverneurs de la BCE  qui s’avouent incapables d’évaluer le rythme et l’ampleur du lent redémarrage de l’économie européenne ? Comment l’investissement et la consommation pourraient-ils en effet repartir comme si de rien n’était dans le marasme d’une situation sans précédent ?

L’opinion publique a été traversée par une véritable onde de choc, la mutation de l’épargne forcée en épargne de précaution en étant une manifestation économique spectaculaire. L’un des moteurs de la croissance a calé. Mais cela va bien au-delà, sans que l’on puisse facilement discerner la profondeur du malaise qui s’est institué et qui ne va pas manquer d’occasions de se manifester.

Afin de limiter les dégâts, l’État continue d’assurer la rémunération du chômage partiel. Mais il est sollicité de tous côtés. Comment deux mois de paralysie des activités peuvent-ils avoir eu un tel effet dévastateur ? La société a fait preuve de résilience, pas le système. Jamais un aussi grand et diffus besoin de changement n’aura été autant ressenti.

Une réponse sur “Malaise dans la civilisation”

  1. Je ne sais pas trop où placer cette information en commentaire, alors comme le titre du papier ci-dessus correspond à l’ambiance générale:

    Nouveaux problèmes pour le réacteur EPR finlandais construit par Areva et Siemens
    https://www.usinenouvelle.com/article/nouveaux-problemes-pour-le-reacteur-epr-finlandais-construit-par-areva-et-siemens.N967816

    Une fuite vient d’être découverte au niveau de la commande mécanique d’une des vannes de sécurité du pressuriseur.
    Hé bien c’est assez gênant, car voyez-vous, le bidule en question permet de garder sous contrôle la pression de l’eau dans le circuit primaire en permettant son expansion.

    Je vous laisse imaginer les conséquences d’une fuite sur le primaire d’une eau radioactive chauffée à 300° sous 155 bars de pression, entrainant la baisse de refroidissement du cœur qui même en cas d’arrêt d’urgence nécessite de maintenir la circulation du circuit primaire pour éviter de fondre et d’exploser.

    Jusqu’ici tout va bien.

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